Lorsque l’eau se raréfie, les vulnérabilités, les tensions, voire les conflits d’usage, s’exacerbent. Ce qui est une réalité chronique dans les régions arides du monde est devenu un sujet en France.
Le dernier bulletin mensuel du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) sur l’état des nappes d’eau souterraine a confirmé la crainte d’une nouvelle sécheresse estivale.
En raison de l’insuffisance de pluies hivernales et printanières assez efficaces pour s’infiltrer dans les sols et recharger les stocks, 68 % des nappes de l’Hexagone étaient en avril dernier en dessous de leur niveau normal – et souvent très en dessous –, contre 58 % en avril 2022.
Depuis 2018, la France a connu des sécheresses chaque été, hormis en 2021. Celle de l’année dernière, la plus sévère depuis 1948-1949, marquée par les méga-incendies dans les Landes, a durement touché les écosystèmes et l’économie. La fréquence des épisodes à ce niveau va s’accroître avec le réchauffement en cours.
Plus d’un millier de communes rurales ont dû prendre des mesures d’exception pour approvisionner leurs habitants. La qualité, principale préoccupation s’agissant de production d’eau potable, soit 21 % des prélèvements nets d’eau (1) en France, se double de plus en plus d’un enjeu de quantité.
Une source de conflits protéiformes
De son côté, l’agriculture, premier secteur consommateur d’eau avec 58 % des prélèvements nets, est prise en ciseaux entre une ressource qui se dégrade et des pratiques qui dégradent la ressource, en même temps que les sécheresses à répétition entraînent une surmortalité forestière.
Des filières agricoles ont ainsi connu de fortes baisses de rendements et la production fourragère des prairies a reculé de 30 % par rapport à la moyenne des vingt dernières années.
A la sécurité alimentaire s’ajoute la sécurité énergétique, elle aussi dépendante de l’eau. Le refroidissement des centrales électriques représente à lui seul 12 % de la consommation nette d’eau en France (et 51 % des prélèvements bruts).
Par ailleurs, du fait de leurs bas niveaux, les barrages ont produit l’an dernier 20 % d’électricité en moins par rapport à la moyenne 2014-2019.
Ces tensions sont une source de conflits déclarés ou latents, qu’on peut ranger en deux grandes familles. Il y a d’abord les oppositions entre les partisans de réponses sociales durables face à l’urgence écologique, d’un côté, et des intérêts économiques plus ou moins étroits et de court terme, de l’autre.
Les cas les plus médiatisés – les mégabassines dans les Deux-Sèvres, les projets de retenues pour alimenter des canons à neige en hiver comme à La Clusaz, ou les dépassements des seuils autorisés de température pour les rejets d’eau chaude des centrales nucléaires dans les cours d’eau – ne doivent pas faire oublier la multitude des bagarres hydrologiques locales.
A ces conflits, qui opposent des visions différentes du rapport des hommes à la nature, s’ajoutent ou se combinent les confrontations des hommes entre eux face à une nature moins généreuse.
Les crises liées à l’eau auront une dimension internationale avec une instabilité politique et une pression migratoire accrue
On peut citer dans ce registre les oppositions entre agriculteurs irrigants déjà dans la place qui se partagent un volume d’eau limité et les nouveaux entrants qui n’y ont pas accès. Ou encore les réactions contre la dérogation accordée en 2019 à la Fédération française de golf pour permettre l’arrosage des greens lors des situations de crise (2).
Entre aussi dans ce champ la question à plusieurs milliards d’euros de la prévention et de la prise en charge des dégâts provoqués par les sécheresses (ou les inondations). Le vote le 6 avril de la proposition de loi visant à mieux indemniser les propriétaires de maisons fissurées par les retraits-gonflements d’argile en raison de la sécheresse des sols est un progrès, mais qui pose en creux la question des moyens publics et privés qui seront alloués ou non à la gestion des crises liées à l’eau.
Des crises qui auront également une dimension internationale avec une instabilité politique et une pression migratoire accrue au sud de la Méditerranée en raison de déficits hydriques grandissants.
Ces conflits de l’eau protéiformes restent contenus. La violence est exceptionnelle et quand elle survient, elle le doit souvent au mode opératoire des forces de police (le barrage de Sivens en 2014, Sainte-Soline en 2023) plutôt qu’à un choc frontal entre usagers. Mais qu’en sera-t-il demain ?
Rareté et trop-pleins
Les tensions vont aller en s’intensifiant, a fortiori si les émissions de gaz à effet de serre ne chutent pas drastiquement dès à présent.
Comme le rappelle Agnès Ducharne, hydroclimatologue au CNRS, « avec le réchauffement global, l’évaporation va augmenter partout, ce qui réduit la ressource en eau et tend à assécher les sols et la végétation. Parallèlement, le réchauffement accroît les contrastes de répartition des précipitations dans l’espace et dans le temps. Il y a des zones où les précipitations moyennes annuelles vont augmenter, comme le nord de l’Europe, et d’autres où elles vont baisser, comme le pourtour méditerranéen. D’où une tendance à l’aridification, qui s’observe déjà au sud de la France et qui va s’étendre sur une très grande partie du territoire ».
Et si l’on parle beaucoup du manque d’eau en été, il ne faut pas oublier les trop-pleins. L’intensification des épisodes de fortes précipitations, en lien avec le réchauffement, va aggraver les inondations, et donc les coûts de gestion et de prévention des crises.
Des inondations d’autant plus brutales que l’urbanisation, l’artificialisation des sols, la rectification des cours d’eau et les pratiques agricoles contrarient l’infiltration de l’eau de pluie… et par conséquent la recharge des nappes souterraines.
L’intensification des épisodes de fortes précipitations, en lien avec le réchauffement, va aggraver les inondations
La sobriété, passage obligé
Peut-on mobiliser davantage l’eau qui tombe du ciel et « va à la mer », via retenues et adductions ? Le territoire métropolitain ne reçoit-il pas près de 200 milliards de m3 par an, tandis que les prélèvements sont de l’ordre de 30 milliards et les consommations, après restitution directe au milieu, d’environ 5 milliards ?
Raisonner à cette échelle n’a pas de sens, rappelle Agnès Ducharne :
« Si l’on regarde la distribution géographique, il y a des endroits où on utilise 10 % de l’eau renouvelable, mais ailleurs, comme dans les Deux-Sèvres, on est à près de 100 %. Et il est extrêmement coûteux d’acheminer l’eau sur de longues distances. Si l’on prélève davantage dans des zones où on est à la limite des disponibilités, on entrera demain dans le manque d’eau, non seulement pour les milieux naturels mais aussi pour les hommes. »
La ressource en eau renouvelable (3) a déjà régressé de 14 % sur une vingtaine d’années à l’échelle métropolitaine, avec des variations bien supérieures dans la moitié sud de la France (4).
Et si en plus l’eau vient à manquer parce qu’elle a été accaparée par quelques-uns, « les gens vont en arriver à la violence, comme on l’a vu à Sainte-Soline », ajoute la chercheuse.
La solution passe nécessairement par la sobriété. Le plan eau présenté par le président Macron le 30 mars prévoit de réduire de 10 % nos prélèvements d’ici à 2030. Une régression par rapport à l’ambition fixée lors des Assises de l’eau en 2019 qui comptaient y arriver en 2024 et visaient – 25 % en 2035.
Il est vrai qu’il sera difficile d’être ambitieux si n’est pas engagée parallèlement une concertation sur les usages partagés de l’eau. Et d’abord avec le secteur agricole, premier concerné.
1. Il s’agit de l’eau prélevée mais non restituée immédiatement dans le milieu aquatique. Prélèvements moins restitution = prélèvement net, ou consommation.
2. Le niveau le plus élevé des arrêtés préfectoraux, qui prévoit l’interdiction de tous les usages non prioritaires de l’eau, y compris les prélèvements agricoles.
3. Différence entre le volume des précipitations et l’eau qui s’évapore des surfaces au sol et via la végétation.
4. Evolutions de la ressource en eau renouvelable en France métropolitaine de 1990 à 2018 », ministère de la Transition écologique, juin 2022.
Cet article fait partie du dossier les nouvelles guerres de l'eau.
Tous les habitants du Pays de Fayence ont reçu un courrier signé par tous les maires de la com-com.
RépondreSupprimerLe tarif dissuasif est le même pour tous les gros consommateurs; cela est normal (il faudra toutefois tenir compte de la situation de certaines familles nombreuses dont la situation n'est pas des plus confortables dans la période actuelle).
Les quantités d'eau surfacturées sont égales pour tous (de 60 à 90m3 par mois) encore normal.
Par contre l'égalité prend un "sacré coup dans les tibias" sur les périodes de surtarification. TOURRETTES 5 mois contre 3 mois à SEILLANS.
Le village montré du doigt pour les déperditions les plus importantes fait bénéficier à ses habitants d'un bonus de 2 mois sur le "serrage de ceinture". Je remercie , par avance, Monsieur HENRY, vice président de la com-com, chargé des problèmes de l'eau, de nous éclairer, sur ce site, sur la méthode employée pour l'élaboration de ces mesures et lui rappelle qu'il a écrit dans la revue "Fayence c'est nous" que FAYENCE ne paiera pas pour SEILLANS (ce que l'on fait dans le cas présent).
Ce qui chassera de mon esprit l'idée aussi "sotte que grenue" qu'une fois de plus, on a versé la dîme au prince-président de la com-com.
Le Sieur Henry est le moins fiable de nos éblouissants illégitimement élus grâce a la covid macro élection (c’est la peste des elections ) . Il va dans tous les sens , a droite , a gauche ,au centre …avec lui le dernier qui a parlé a dans tous les cas raison . ET oui , ce sieur la va demander aux villages le plus serieux (7 agents pour les fuites )de payer pour le village le plus honteux ( un agent , très léger )pour les fuites)
RépondreSupprimerPeut etre a t il quelques services personnel a rendre aux couple d’éblouissants Seillans-Montaurousiens .C’est ça la gestion en bon pere de famille , de la comcom .
Il faut bien rendre et rembourser ses dettes politiques , Non ? C’est comme ça que cela fonctionne .
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