jeudi, septembre 13, 2007

GESTION DE L'EAU: SERVICE PUBLIC OU PRIVÉ

Essayons de dépasser les polémiques entre les partisans de l'eau service public. Les liens "sources" à gauche du document titre et leurs auteurs, montrent d'évidence que nous sommes plus dans un débat idéologique contre l'enterprise privée, que dans la raison.
Précision: ceci ne concerne pas (ou peu) E2S et notre canton; mais comme on m'en parle souvent, j'ai cherché à faire le point...

6 commentaires:

Robert Cecchinato a dit…

Je ne suis pas d'accord avec votre analyse, voir ci dessous des retours d'expériences

INTERVENTION de Michel PARTAGE, Maire de VARAGES (83)

Michel PARTAGE rend compte de l’expérience de sa commune, qui a réussi à se libérer d’une Délégation de Service Public à une société privée et à revenir en régie communale.

La gestion privée ne donnait pas satisfaction à la commune. Il n’y avait pas de service de proximité et une seule personne s’occupait de plusieurs communes. Elle était donc difficile à joindre et en cas de problèmes (fuites par exemple), il fallait attendre plusieurs jours pour que la société intervienne.
Pour éviter tout problème, la compagnie chlorait au maximum légal, ce qui rendait l’eau imbuvable. Curieusement, le goût de l’eau n’est pas mentionné dans le contrat.
De plus, les travaux d’entretien n’étaient pas assurés régulièrement (château d’eau, réseau). Il faut savoir que l’entretien « normal » doit être assumé par la société privée, tandis que les travaux d’investissement sont payés par le budget communal. D’où l’intérêt pour les sociétés privées de laisser les réseaux se délabrer.
La campagne des municipales de 2001 s’est faite sur le thème de l’eau. Deux listes se sont affrontées : l’une pour le statu quo, l’autre pour le retour en régie. C’est cette dernière qui a obtenu 14 sièges sur 15.
Seules les communes de Mouans-Sartoux et Neufchâteau ont proposé leur aide à la municipalité pour mettre en place le retour en régie.
Actuellement, les revenus de l’eau engendrés par la gestion publique ont permis la création de 3 emplois à temps complet, qui assurent une permanence 24h/24, 7 jours sur 7. Conséquences : un service de proximité et une baisse des prix.


INTERVENTION de Francis PUJAGUE, maire de CONTES
La commune de Contes est comparable à celle de Peymeinade. Elle est membre d’un syndicat intercommunal qui regroupe 12 communes et gère l’eau.
Jusqu’en 1965, la gestion de l’eau était répartie entre une régie communale, pour 1/3 des habitants et un syndicat intercommunal, pour 2/3 de la population.
Par la suite, c’est la Compagnie générale des Eaux qui a géré l’ensemble.
Entre 1994 et 1999, les habitants ont mené une bataille pour obtenir le retour en régie communale et une baisse des prix (Contes était la commune de France où le prix de l’eau était le plus élevé).
Les habitants ont fait appel à un spécialiste pour comprendre la situation.
La CGE surfacturait de 6 millions de francs/ an, selon un système assez couramment appliqué.
Le 1er contrat avec la CGE a été signé en 1935, pour la partie gérée par le syndicat et, de 1935 à 2000, la compagnie n’a jamais été mise en concurrence.
Les conventions étaient signées pour des périodes de 20 ou 30 ans. Or, 8 ou 10 ans avant l’échéance, l’entreprise proposait au syndicat intercommunal une amélioration de la situation, moyennant un avenant qui prolongeait le contrat.
Ainsi, alors que l’échéance devait courir jusqu’en 1997, dès 1988, la CGE a expliqué qu’il fallait davantage d’eau et qu’elle était propriétaire d’un terrain adéquat. Elle a donc proposé de réaliser les forages à ses frais, ne réclamant en contrepartie qu’une prolongation du contrat jusqu’en … 2017 ! Coût de l’opération : 12 millions de francs, avancés par la CGE, qui récupérait par un surprix sur l’eau, indexé sur les quantités consommées. En raison de l’augmentation des abonnés, le remboursement s’est accru de façon exponentielle.
La CGE a aussi mis en place un système de fonds de travaux, consacré à l’investissement.
Pour l’entretien, l’entreprise a obtenu des élus une majoration des prix permettant d’alimenter un fonds pour faire des réparations sans rien demander aux communes.
Ces fonds de travaux permettent de réaliser des travaux sans aucune mise en concurrence. La CGE n’avait jamais à rendre de comptes et les réseaux n’étaient jamais entretenus .
Pour livrer la bataille contre la CGE, une association de 1 400 membres s’est constituée. Ils ont payé les factures d’eau sur un compte bloqué des 2/3 du montant réclamé. Le contrat avec la CGE a été résilié et il y a eu remise en concurrence de DSP. L’association a sollicité d’autres entreprises, y compris en Italie. Le marché a été adjugé à RUAS pour une période de 10 ans, à un prix inférieur de 35% à celui pratiqué auparavant. La CGE a participé à cet appel d’offres et a proposé un prix quasiment identique à celui de RUAS ! Cela a mis un terme à 70 ans de gestion à un prix exorbitant.
A Contes, la partie en régie communale a été concédée en 1965 à la CGE par commodité, pour une durée de 30 ans. Au terme du contrat, la commune a voté la reprise en régie directe de cette partie, tandis que le syndicat intercommunal restait avec la CGE. La compagnie a mis en cause le vote municipal et le Préfet a contesté la délibération. La commune a intenté une action au Tribunal Administratif qui lui a donné raison.
Entre-temps, la municipalité a procédé à des forages pour trouver de l’eau souterraine. En 1996-1997, Contes avait son eau et a pu réaliser des investissements grâce à des aides publiques. La régie communale compte 800 familles abonnées ; elle emploie 2 agents qui ont amélioré le réseau, contrairement à la CGE. Le prix a baissé, la régie s’équilibre et amortit ses investissements.

pratclif a dit…

Intéressant en effet:

La question n'est pas de savoir si vous êtes d'accord sur l'analyse; en effet, il n'y a pas de conclusion même si vous avez l'impression que je suis en faveur de la privatisation. Si vous avez lu le rapport de la cour des comptes qu'on ne peut pas taxer de partialité, - ce sont les experts de l'analyse de tels sujets - vous aurez vu qu'ils ne prennent pas partie pour un côté ou l'autre; ils montrent les dysfonctionnements de chaque côté. Et surtout les interventions des ministères, collectivités locales et entreprises à la fin sont très éclairantes. La cour des comptes dans son rapport nous explique tout cela. Maintenant si des contrats passés étaient léonins, de trop longue durée, reconduits automatiquement, sans appel à la concurrence, etc. à qui la faute?

Puisque nous débattons du sujet, voici ce que je pense. L'eau n'est pas une matière gratuite contrairement à ce que disent certains liens de gauche de mon dossier; l'eau a un coût, de production, de traitement, de distribution et d'assainissement. Ce qu'ils veulent dire je suppose c'est que l'eau, matière si essentielle à la vie, comme l'air aussi, ne devrait pas être l'objet de marchandisation, surtout pas par une société commerciale; car dans notre société française, les entreprises, sociétés commerciales, sont les villains qui s'en mettent toujours plein les poches. Or, près de la moitié des français (actifs et leurs familles) vivent de l'État directement ou par les entreprises parapubliques. Il faut tout de même se rendre compte que ce sont les entreprises marchandes de produits et de services qui permettent le fonctionnement de l'État par leur production et les prélèvements fiscaux.

L'eau a donc un coût et ce coût il faut bien le couvrir soit par une régie municipale soit par une délégation à une entreprise privée, en fermage ou en concession, et ce devrait donc être la même chose aux bénéfices nets près, je dis bien nets, de l'entreprise. Ces bénéfices nets sont la rémunération des fonds propres de l'entreprise, alors que la régie municipale n'a pas a faire de bénéfices nets puisque les fonds propres ont été apportés par les contribuables. Si vous avez des économies et que vous les placez quelque part, vous attendez, pour le moins, une rémunération qui maintienne constant le pouvoir d'achat de vos économies. J'observe que, avec bien d'autres, vous élevez à juste titre contre le gaspillage de l'eau. L'eau gratuite ou pas chère, en tout cas inférieure à son coût économique, c'est pourquoi? pour gaspiller davantage, arroser des pelouses vertes à l'anglaise ou entretenir des plantes tropicales?

Pour finir, les témoignages que vous apportez et qui s'ajoutent à ceux de gauche de mon dossier: le premier (Varages Var) est un témoignage "à charge" de l'entreprise privée; mais cela relève encore d'une mauvaise gestion de contrat par la collectivité locale et du non respect du cadre de négociation des contrats défini par la loi du 29 janvier 1993. Et le second (Contes AM) est aussi ce que la Cour des Comptes dit. Mauvaise gestion du contrat par les collectivités locales. CQFD.

Anonyme a dit…

HORS SUJET, MAIS QUAND MEME

A propos de gaspillage
pourquoi, alors que nous sommes en periode de crise, laver à grande eau les rues du village de Montauroux tous les matins?
Pourquoi les fontaines du village, et elles sont nombreuses, continuent-elles à fonctionner?

pratclif a dit…

Non pas hors sujet; c'est bien un problème de société que l'eau. Ce n'est pas parceque notre canton et E2S disposent d'une ressource rare qu'est la résurgence de la Siagnole, que le réseau est entièrement gravitaire et la qualité de l'eau ne nécessite qu'un traitement léger, qu'il ne faut pas connaître les problèmes de l'eau....

Anonyme a dit…

difficile de passer de l'idéologie à la réflexion, un contrat léonin mal suivi est bien sûr moins satisfaisant qu'une régie efficace, mais les sociétés privées ont apporté leur expertise, celle provenant de l'accumulation d'expériences diverses, aux problèmes de nombreuses collectivités, celles qui n'ont pas de ressource évidente, de qualité et exploitée depuis 2000 ans dans une zone au développement encore maîtrisé.

l'eau étant par ailleurs un produit non transportable hors nature dans des conditions économiques (voir le prix au litre de l'eau minérale, celui de 500 litres d'eau du robinet), non stockable à la source (laver les rues ne prive personne, sauf pénurie de débit) et de prix non homogène (transport et traitement sont très variables) sa bonne gestion relève de la conjonction de bonnes compétences techniques, d'une attention constante de politiques avisés et d'une préoccupation raisonnable de service public (évitons de voir la panacée dans la nationalisation ou dans la privatisation, le service public peut être encadré efficacement par le législateur et optimisé par une concurrence gestion privée contrôlée ou publique directe).

pratclif a dit…

@Patrick Schreiber
Dans la ligne de votre commentaire Voir cet article des Annales des Mines: L’eau, un domaine d’excellence
pour les entreprises françaises.