Eau: la sobriété va s'imposer inexorablement... rappel d'un article du NJ N° 55 Automne 2022

RÉACTION À L'ARTICLE «QUE D'EAU !» DE M. JEAN-FRANÇOIS BOYER (NJ N° 54- P.15)
Par Claude Toconi, à Seillans

Extrait du NJ 55: Jean François Boyer remarque dans le NJ N° 54 : "Au cours des quarante dernières années, le terrain constructible est la seule chose que l'on a été capable de produire". J'ajoute : «En oubliant que, depuis l'antiquité, la gestion de l'eau a été primordiale dans l'histoire, la géographie, la sociologie et l'imaginaire de la population de notre belle région». Durant la deuxième moitié du XXe siècle, ces traditions se sont effacées au profit de l'enrichissement foncier de certains, de la prolifération de maisons individuelles, et de la société mercantile (cf. : la multiplication des supermarchés le long de la RD562).

Plus grave : les habitants ont été indirectement encouragés à négliger cette précieuse ressource du fait de tarifs modérés.
L'Observatoire des services publics d'eau et d'assainissement indique : au 1 er janvier 2021, le prix global moyen du m3 en France est de 4,30 € TTC (comparez avec vos anciennes factures et au soi-disant <tarif dissuasif») et, en 2020, chaque français utilise en moyenne 149 litres d'eau potable par jour (le quota lors de notre «crise sévère»!)
Bien entendu, un tarif modéré est essentiel pour les foyers modestes (qui sont rarement des «gros consommateurs»). Sa généralisation est pourtant néfaste :
Il encourage la construction de piscines : 730  cadastrées' à Seillans (Var Matin 27/08/22) combien dans le canton? Avec un surplus de consommation inévitable en été; la plantation d'essences et pelouses gourmandes en eau; la négligence des propriétaires vis-à-vis des fuites; et tant d'autres comportements néfastes associés, semble-t-il, à l'absence de contrôle des consommations. Il aura fallu une sécheresse inédite pour que la régie réalise qu'une habitation du canton consommait 23000 L par jour! (Le Monde 11/08/2022).
Il est temps de prendre conscience qu'il n'y a pas de solution technique et financière à chacun des travers de notre société, et que la soif de bien-être nous a tous rendus complices d'une hérésie environnementale.
Malgré les progrès dans les captages et la distribution de l'eau, la ressource restera de plus en plus limitée et la sobriété s'imposera tôt ou tard.
La «Mission Flash» consacrée au bilan de l'expérimentation d'une tarification sociale de l'eau (site de l'Assemblée Nationale) préconise, entre autres :
«Une tarification progressive présente l'avantage de poursuivre un objectif à la fois écologique et social Cette tarification (..), en distinguant trois tranches de prix à partir des consommations annuelles
-    une première tranche de 0 à 80 m3 pour "l'eau essentielle", à un coût symbolique. Dans cette tranche, un tarif préférentiel serait appliqué aux foyers en situation de précarité;
-    une deuxième tranche de 81 à 200 m3 pour `l'eau utile", à un tarif inférieur au coût des services;
-    une troisième tranche au-delà de 200 m3 pour "l'eau de confort", à un tarif supérieur permettant d'équilibrer le budget du SPEA '2.
Ce dispositif de tarification progressive peut être complété, le cas échéant, par des aides (...), notamment pour les familles nombreuses (...), ou lorsque les frais d'eau continuent de représenter plus que 3 % des revenus.
Cette tarification n'exclut pas les mesures ponctuelles (amendes, pastilles) pour ramener à la raison les « gros consommateurs,», ni la modulation hiver/été.
Dans le cas de la distribution de l'eau, un bien commun, les services publics peuvent identifier les comportements abusifs. Encore faut-il accepter d'exercer la responsabilité qui incombe aux élus et/ou représentants de l'État, nonobstant leur souci de ne pas déplaire à tel ou tel. Avant de les critiquer sans discernement ou colporter des rumeurs malveillantes, nous devons comprendre que les appels à la sobriété hydrique vont à l'encontre de bien des intérêts, depuis le lobby des piscines omniprésent dans notre région, en passant par les locations saisonnières officielles et officieuses, les pépinières, jardineries, ceux qui bénéficient de la «manne touristique», et nombre d'autres que je ne citerai pas; sans parler des atteintes au confort de chacun d'entre nous, que dénoncent ingénument les protestataires les plus loquaces. Hormis les cas particuliers, un tarif progressif adapté pourrait faire effet sans qu'il soit nécessaire de multiplier les alertes et arrêtés.
Il importe aussi que les décisions soient transparentes. La régie des eaux doit rendre public l'ensemble de ses données sur la consommation.
1 Service Public Eau et Assainissement

 

Sources NJ du pays de Fayence N° 54 et N° 55