Dès cet été, les pelouses du golf de Mandelieu-la-Napoule devraient être arrosées avec de l’eau retraitée d’une station d’épuration. Longtemps embourbé, le projet a rejailli après la sécheresse. Les économies d’eau sont engagées et de nouvelles techniques apparaissent. Le propriétaire, Jean Stéphane Camerini, assume les changements que cela implique et se prépare à l’impact des pénuries d’eau. La sécheresse de 2022 a agi comme un déclencheur
C’est ici qu’un projet de "Réut" est en train d’aboutir, ce procédé qui rend possible l’utilisation d’une eau retraitée, en sortie de station
d’épuration. Un procédé dont tout le monde parle, comme d’une solution pour affronter les pénuries d’eau à venir."On est face à un mille-feuille administratif"
Jean Stéphane Camerini, propriétaire du golf Old Course de Cannes-Mandelieu
"Nous avons initié cette réflexion de longue date. La station d’épuration Aquaviva, située à proximité, est de dernière génération. La qualité de l’eau permet cette réutilisation, énumère Jean Stéphane Camerini, le propriétaire du golf. Il y a eu des batteries de tests de la part de l’Agence régionale de santé. On est face à un mille-feuille administratif."
Dix ans après, le mille-feuille n’est pas encore digéré, puisqu’il manque "un dernier coup de tampon". Mais on n’a jamais été aussi près du but, assure encore le responsable.
L'expérience de 2022
La sécheresse de l’an passé a agi "comme un déclencheur". Dernier signal, la venue à Cannes de Cristophe Béchu, ministre de la transition écologique, promettant un décret facilitateur dans le cadre du plan eau du gouvernement.
"Les solutions vont devoir être mises en œuvre beaucoup plus rapidement"
Philippe Denis, chez Veolia Eau
"Les solutions vont devoir être mises en œuvre beaucoup plus rapidement, estime aussi Philippe Denis, directeur du développement à Veolia Eau, région Méditerranée. On parle d’irrigation, de golfs, de nettoyage de voiries, de vignobles, tout un panel d’utilisations."
Le poids des études
Quant à la simplification attendue, le spécialiste de Veolia admet que "la réglementation rigidifie beaucoup de choses, car elle impose de faire de longues études". Selon lui, "les process sont connus et maîtrisés aujourd’hui, et il n’est pas nécessaire de passer des années à faire des études".
Sur le papier, le golf de Cannes-Mandelieu sera en partie arrosé par de l’eau réutilisée, dès cet été. "Les travaux de raccordement sont programmés pour la première semaine de mai." Les vannes attendent et le temps presse.
Le 13 mars dernier, le préfet des Alpes-Maritimes a déclenché le seuil alerte sécheresse dans tout le département, ce qui englobe une interdiction d’arroser en journée.
"L’économie des usages de l’eau est indispensable, indépendamment du contexte dans lequel on vit, prévient-on chez Veolia. On ne peut pas vouloir faire de la Réut si on n’essaie pas d’éduquer l’ensemble des usagers dans la recherche d’économies."
Déjà 26 % d’économie
Sur son golf de 74 hectares, Jean Stéphane Camerini ambitionne de baisser la consommation d’eau de 40 %. Un objectif réalisable selon lui. "Nous l’avons déjà baissé d’un quart. L’été 2022, nous avons volontairement anticipé de quinze jours les restrictions de l’arrêté préfectoral."
"Nous nous habituons à moins d’eau et nous adaptons nos pratiques."
En attendant le raccordement à l’eau réutilisée, c’est de l’eau brute, "et non une eau potable", qui irrigue le gazon. Ou plutôt, les gazons. "Nous nous habituons à moins d’eau et nous adaptons nos pratiques."
Nouveau sur les cours, le Bermuda ibiza. Non une mode vestimentaire de vacanciers, mais une variété de gazon résistante à la sécheresse, la chaleur, aux maladies. "Nous avons commencé un travail d’information avec notre clientèle, pour faire connaître cette plante, détaille Julian Simon, directeur adjoint du golf. Car elle jaunit en hiver. On nous demandait si on n’arrosait plus."
La plante entre en dormance, pour mieux reverdir dès le printemps. Il faut accepter cette couleur fanée pendant l’hiver. Puis, une fois Ibiza bien installé, les besoins en eau diminuent de façon considérable.
Autre changement, les sols sont comme percés en surface, "décompactés", par de petits trous comblés de sable. Pour permettre à l’eau de mieux pénétrer.
Avec leurs étendues verdoyantes, les golfs savent être sous les regards, au risque de l’opprobre public, quand l’heure des restrictions d’eau arrive. "Souvent le golf n’est pas bien perçu, il est important de communiquer sur ce qu’on fait. Il ne serait pas normal qu’il y ait deux poids deux mesures. Et ce n’est pas le cas."
Cet hiver, à cause du manque de pluie, il a fallu arroser. Cet été sera peut-être envisagé avec plus de sérénité. Enfin… s’il y a la "Réut".
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